Nombre de rayons faible, partie 1

juillet 04, 2022 3 Commentaires

La réduction du nombre de rayons est devenue une tendance de masse qui perdure encore aujourd'hui. À la fois effet de mode et nécessité pratique, elle nous concerne tous. Penchons-nous sur le sujet du nombre de rayons et tentons de répondre à la question : quel est le nombre de rayons idéal ?

L'ère des 36 rayons
Pendant un siècle, le nombre de rayons est resté stable à 36, un choix qui, malgré sa densité relativement élevée, présente des avantages :

1. Les compas et les instruments de dessin sont gradués en degrés, 360 par tour ; diviser par 10 est donc simple. 36 est un nombre familier, facile à partager et à adopter.
2. Les vélos utilisent des roues de 20 à 29 pouces de diamètre, adaptées à la morphologie humaine et au terrain. 36 rayons offrent un espace suffisant entre les écrous pour le serrage des clés.
3. Le fil d'acier supporte si bien une tension élevée qu'un grand nombre ne représente qu'un petit poids : 72 rayons et écrous = seulement une livre.
4. La forte densité de rayons offre un excellent soutien, permettant l'utilisation d'une large gamme de matériaux pour les jantes : bois, acier, aluminium et composites.

Ainsi, les bicyclettes propulsées par des roues à 36 rayons ont conquis la planète.

1. Vint d’abord l’ère des jantes en bois, largement utilisées et dominantes en compétition (1900–1950).
2. Après la Seconde Guerre mondiale, l'aluminium développé pour l'aviation a permis des formes creuses, des crochets de jante pour les pneus démontables et des profils en forme d'aile avec une résistance au vent plus faible (1950-2000).
3. L'arrivée des matériaux composites (fibre de carbone, etc.) a permis des formes aérodynamiques complexes et de grande taille sans pénalité de poids importante (2000+).

Le début des faibles nombres de rayons
L'aérodynamisme a fait son apparition soudainement dans le cyclisme au début des années 1980. En 1983, Rory O'Reilly (membre de l'équipe nationale américaine) a mené des tests aérodynamiques dans la soufflerie de l'Université de Washington, découvrant une corrélation quasi directe entre la résistance au vent et le nombre de rayons : la moitié du nombre de rayons entraînait une réduction de moitié de la traînée aérodynamique. Une véritable surprise ! Nous avons alors conçu une roue avant à 20 rayons avec laquelle il a remporté la première médaille d'or américaine en cyclisme aux Jeux panaméricains (kilomètre, Bogota, 1983). 20 était un nombre radical pour une épreuve comme le kilo.

L'équipe américaine a utilisé de nombreuses roues à faible nombre de rayons (16 à 24) pour remporter 9 médailles aux Jeux olympiques de Los Angeles de 1984. Quel que soit leur rôle exact dans ces victoires, les roues à faible nombre de rayons ont connu un démarrage remarqué et ont commencé à se répandre dans le monde entier.

La fabrication de ces roues a démontré que les jantes avaient progressé bien plus vite qu'on ne le pensait. 36 rayons étaient désormais souvent superflus. Des expérimentations ont révélé que l'on pouvait se passer de rayons tout en conservant une solidité satisfaisante. Un chapitre majeur de la conception des roues s'est ouvert avec la convergence de deux tendances apparemment sans lien : la technologie des jantes et les objectifs aérodynamiques.

Les bricoleurs ne peuvent s'empêcher de transgresser les règles et de sortir des sentiers battus. Nous roulions sur des roues trop petites, trop légères, trop bon marché, etc., par simple curiosité et pour le plaisir. Certains bricoleurs de roues des années 1980 étaient difficiles à manquer :

1. En 1980, Mavic a créé le vélo de contre-la-montre Gitane pour Hinault. Remarquez le tube diagonal aérodynamique, la douille de direction carénée, les câbles de commande dissimulés, les roues à 24 trous, la vis de serrage de selle cachée, le frein avant inversé… autant d’éléments révolutionnaires pour l’époque.
   
2. Roval a lancé des roues ingénieuses à faible nombre de rayons en 1979.
   À noter les caractéristiques radicales : écrous de rayon dissimulés, rayons profilés, carénages à bride, rayons à traction droite et jante à large section.

Gestion des charges

1. Le moyeu assure l'angle de renfort (largeur entre les flasques), la jante et les rayons définissent davantage la structure : une jante plus solide nécessite moins de rayons et vice versa.
2. La somme des tensions des rayons influe sur la capacité de charge d'une roue : plus de rayons à tension plus faible équivaut à moins de rayons à tension plus élevée.
3. Une jante plus rigide répartit les charges sur un plus grand nombre de rayons, de sorte que, pour une force donnée, elle peut résister à la déformation avec moins de soutien des rayons.
4. Si un rayon casse, une jante plus rigide peut conserver son alignement avec moins de soutien des rayons.

La conception des roues est un exercice d'équilibre : un faible nombre de rayons peut être compensé par une jante plus robuste et une tension plus élevée. Un grand nombre de rayons, comme 36, soulage la jante et les rayons, créant ainsi un environnement tolérant à l'utilisation de matériaux et d'une qualité de fabrication moindres. L'un des grands succès du vélo réside dans sa capacité à s'imposer même dans les milieux les plus défavorisés.

À mon avis
La disponibilité de matériaux de pointe et de concepts aérodynamiques ne suffit pas à expliquer la popularité persistante des roues à faible nombre de rayons. L'aérodynamisme présente peu d'intérêt pour la plupart des cyclistes. Les avantages se manifestent à des vitesses qu'ils atteignent rarement. La popularité de ces roues tient sans doute en grande partie à la mode, à des aspirations – comme celle de porter la tenue d'une équipe professionnelle. Aucun mal à cela, sauf si l'on croit aller plus vite !

L'industrie, à l'instar de la mode, impulse les tendances en cherchant à accélérer les cycles d'adoption et d'obsolescence. La bonne nouvelle, c'est que des millions de roues à rayons bas (notamment la combinaison route 20 x 24, très courante) sont utilisées et suscitent très peu de plaintes.

Existe-t-il un nombre idéal de rayons ? Trop de variables entrent en jeu (combinaisons, facteurs d’équilibrage, considérations esthétiques, cyclistes, budgets) pour définir un nombre de rayons « idéal ». Pour une application spécifique, seule l’expérience permet de se guider. Le bon sens suggère des principes comme :

1. Réduisez au minimum la complexité, le poids et les dépenses lorsque les avantages sont minimes.
2. Mieux vaut être prudent ! La sécurité avant tout ! On ne peut pas contrôler la météo, la gravité et l’état des routes ; c’est déjà assez d’incertitudes sans ajouter des roues risquées.
3. Le côté pratique prime toujours : utilisez le matériel disponible, même s'il n'est pas parfait, c'est la mentalité des cyclistes.
4. Oubliez les préjugés sur les chiffres et abordez les situations avec un esprit ouvert. Tirez profit des leçons gratuites qui se présentent à vous.
5. Expérimentez et testez, mais sur vous-même et à votre rythme. Vous êtes un constructeur au service des besoins des cyclistes, et non l'inverse !
   

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