janvier 15, 2008 4 Commentaires
Lorsque Zap m'a demandé de partager mes souvenirs des débuts de Mavic aux États-Unis, j'en ai profité pour contacter un vieil ami à San Francisco, Richard Goodwin, qui avait une grande expérience de la marque. Nous avons chacun écrit quelques mots sur le passé, rien de sérieux. Ceux qui ne sont pas mentionnés ici ne sont pas oubliés. Ce ne sont que de brefs souvenirs.
J'ai décidé de les partager avec vous. Le temps passe, mais les souvenirs restent.
Richard Goodwin :
Durant l'été 1984, j'ai eu la chance d'être invité en France par Jonathan Boyer et Bruno Gormand pour travailler chez Mavic et sur le Tour de France pendant deux mois. J'ai finalement passé huit ans au sein de l'entreprise (jusqu'en 1992). J'ai lancé le programme Mavic Neutral Assistance aux États-Unis et suis devenu par la suite co-responsable des opérations américaines.
Mavic fut l'une des rares entreprises françaises « traditionnelles » à survivre à la « malédiction de Saint-Étienne ». Dans les années 70, l'industrie française du cycle détenait une part importante du marché des vélos à 10 vitesses. Peugeot, Motobécane et d'autres marques françaises dominaient ce secteur. Mafac, Simplex, Huret, Stronglight, Nervar et d'autres fournissaient les composants pour ces vélos. Puis les Japonais sont arrivés sur le marché, et nous connaissons tous la suite. Vous trouverez ci-dessous les portraits de quelques personnes que j'ai eu la chance de côtoyer (et que je connais encore) durant mon passage chez Mavic. Mon seul regret est de ne pas avoir acheté de maison en France pendant ces années.
Avant tout, le Mavic que j'ai connu dans les années 80 et 90 était autant une famille qu'une entreprise. C'est pourquoi, lorsque la société a transféré son siège social de Saint-Trivier-sur-Moignans à Annecy après son rachat par Salomon, nombre d'employés sont restés sur place, même si le déménagement ne représentait qu'environ 130 kilomètres. Typiquement français.
Bruno Gormand (président) était un entrepreneur typiquement français. Fumeur, amateur de bons repas, il menait la vie d'un playboy. Il connaissait absolument tout le monde dans le milieu cycliste européen. Il prit les rênes de l'entreprise en 1964 et mit en place l'équipe qui y resterait jusqu'à la fin du siècle. Sa vision : une assistance neutre en course, des composants de qualité et des jantes anodisées dures (SSC Gris). Si les composants Mavic connurent un succès mitigé sur le marché, nombre de leurs innovations sont aujourd'hui omniprésentes dans l'univers du cyclisme. J'étais présent à ses obsèques à l'église de Saint-Trivier-sur-Moignans en décembre 1985. Le gratin du monde cycliste était réuni. Des milliers de fleurs arrivèrent de presque toutes les entreprises du secteur. L'hommage était si nombreux que le petit cimetière où il reposait était tellement rempli que la plupart des autres tombes étaient également recouvertes de bouquets offerts par ses pairs du monde du sport et de l'industrie.
Jean-Pierre Lacombe… L’enthousiaste responsable du développement produit et de la R&D. On pouvait lire l’étincelle dans ses yeux lorsqu’il présentait l’une des nouvelles créations de son équipe. Qu’il s’agisse de dérailleur électronique ou de jantes soudées à flancs usinés, l’enthousiasme de Jean-Pierre pour la R&D et le cyclisme était contagieux. Il était l’étincelle qui alimentait l’innovation chez Mavic et qui permettait à l’entreprise de rester attractive grâce à son innovation constante.
Feue Josette Paccard… Josette est née et a grandi dans le département français de l'Ain, où Mavic s'est implantée en 1967. En réalité, Josette aurait pu être une Française de province. Directrice des ventes et bras droit de Bruno, elle était tout sauf provinciale. Tous les clients étaient importants à ses yeux. Elle a fait de gros efforts pour apprendre l'anglais et était toujours disponible et agréable. Elle abordait son travail et celui de Mavic avec une franchise très « américaine ». Je suis convaincu qu'elle a grandement contribué au succès de Mavic durant son passage dans l'entreprise.
Laurent Michelon dirigeait le service des courses, un département neutre et fournisseur d'équipes. Ce jeune Français, très provincial, semblait en vouloir aux deux Américains qui avaient envahi son atelier en 1984. Onze ans après avoir quitté Mavic, je suis retourné en France et je suis passé le saluer. Il était visiblement ravi de revoir son premier élève américain. Le mois précédant le Tour, nous avions pour mission (avec Laurent) d'apprendre les subtilités des composants Mavic et de monter les quarante vélos destinés à l'équipe Café de Columbia, la première équipe colombienne à participer au Tour de France. Je le revois chaque année lors de mes séjours en France.

Moi :
Pour un jeune passionné de vélo des années 70, le monde du vélo haut de gamme était simple. L'Italie proposait des cadres élégants et des groupes exceptionnels. La France dominait les roues, les chaînes et les vélos de grand tourisme. Le reste du monde comptait quelques marques remarquables : Hetchins et Brooks en Angleterre, Mondia et Assos en Suisse, Zeus en Espagne. Mais, globalement, l'Italie et la France étaient reines.
Dès le début de ma carrière, j'ai été fasciné par les roues. La tension invisible, l'apesanteur, la rotation constante, les mystères de leur fabrication et la façon dont elles transforment un vélo (bien plus qu'un cadre ne transforme un groupe)... rien d'autre ne pouvait rivaliser. Et la France dominait le marché des roues. La France était donc le centre de mon univers.
Jantes Super Champion ; pneus Wolber, Hutchinson, Michelin et Dugast ; rayons Robergel et Bayard ; moyeux Maillard, Atom et Maxicar ; roues Roval ; et, bien sûr, Mavic. Quelle influence considérable ces marques ont dû s’exercer les unes sur les autres ! Ensemble, elles étaient à des années-lumière du reste du monde. Toutes les tendances qui ont suivi en matière de roues ont vu le jour ici : jantes en aluminium, roues à disques et à rayons en carbone, moyeux à roulements à cartouche, rayons aérodynamiques, roues à faible nombre de rayons, pneus à tringle haute pression, jantes aérodynamiques… la liste est longue. Pour un enfant de Palo Alto, la lecture du français était indispensable et Le Cycle était une source d’inspiration mensuelle.
Au fil des années, Mavic s'est imposé comme le seul de ce groupe à forger une culture forte et à échapper au déclin général de l'industrie française du cycle. L'entreprise alliait une ingéniosité technique remarquable à un sens aigu du spectacle et du style. Cette combinaison lui a permis d'anticiper et de dominer le marché, avec les résultats que l'on connaît aujourd'hui.
Pendant des années, j'ai donc été passionné par Mavic. Wheelsmith était fier d'être le plus gros client nord-américain de Mavic. Mavic nous a accueillis comme des membres de la famille et nous avons ressenti une confiance que le milieu cycliste californien, à lui seul, n'aurait pu nous apporter. Aussi, lorsque Bruno Gormand est décédé tragiquement, la crise qui s'en est suivie au sein de l'entreprise a été très concrète pour nous. Comment l'entreprise pouvait-elle survivre alors que seules sa femme et ses filles lui succédaient ? Bruno était une figure emblématique. Comment Ferrari aurait-elle pu survivre sans Enzo, ou Campagnolo sans Tullio ?
L'ingéniosité dont ont fait preuve les femmes Gormand était une véritable source d'inspiration. Le soutien qu'elles ont reçu de la part de l'équipe Mavic et d'autres partenaires a permis d'amorcer une série de succès sans précédent en matière de produits et de commercialisation. Le fait qu'un important bureau américain se trouve à proximité, à Monterey, était un atout précieux pour nous : nous n'étions jamais loin des activités de Mavic.
C'est drôle comme j'ai souvent rêvé de travailler pour Mavic. Et pourtant, pendant toutes ces années, je n'ai jamais tenté ma chance. Peut-être que je me doutais que la réalité ne serait pas à la hauteur. Ou peut-être vaut-il mieux apprécier une grande entreprise de loin.
novembre 02, 2021
Recently while visiting in Bar Harbor, ME, I met a gentleman who said he used to head MAVIC USA. He now lives in Florida but summers in an Airstream camper in Maine. He was a tall, fit looking man with a straight smile, kind of a cross between Jack Palance and Clint Eastwood, about 70 years of age. Do you know him…I didn't get his name?
novembre 02, 2021
25 years of Wheelsmith was about enough. 50 years of Northern California, also. An opportunity (FSA) appeared in Seattle. The move was easy. These regions are super similar, but all of the Bay Area's virtues are multiplied, IMHOP.
With renewed optimism, we now have Wheel Fanatyk and Mad Fiber.
novembre 02, 2021
Love the story. How did you come to leave wheelsmith and end up at FSA?
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Ric Hjertberg
novembre 02, 2021
That was Art Wester. A consummate gastronomique and story teller. Hence his long, effective relationship with Mavic. He'd be glad to hear your description. I'd say, "craggy New Englander." ;-)